Eireann Yvon

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Amoureux de la lecture et de la Bretagne, j'ai fait au hasard des salons littéraires de la région beaucoup de connaissances, auteurs ou lecteurs.
Vous trouverez mes chroniques ici :
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A bientôt.
Yvon

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14 mars 2016

Après moi le déluge !

Second roman de la bibliographie de Jim Thompson après "Ici et maintenant" et donc avant ses futurs chefs d’œuvre !
Nous sommes à Verdon, bled paumé du Nebraska, état paumé du trou du cul de l'Amérique pauvre et profonde.
Un train arrive en gare, une femme en descend, ou plutôt elle chute et s'en prend aux chemins de fer, chose qui parait courante en ce lieu. Elle se nomme Mme Dillon, elle est avec son fils Robert. Son mari est quelque part loin. Où ? Personne ne le sait !
Au chapitre 18, à la 193e page, Jim Thompson nous fait quand même un bref résumé que je vous livre intégralement.
« Il y eut largement de quoi alimenter les commérages cette année-là à Verdon : Alfred Courtland reprit la banque, Philo Barkley lança une affaire de courtage et de petits prêts dont il s'occupait à son domicile.
Jeff Parker se vendit aux chemins de fer (la preuve en fut enfin donnée).
LinkFargo eut une attaque qui l'obligea à garder le lit pendant plusieurs mois.
Edie Dillon devint propriétaire de l'hôtel.
Et Grant Fargo se mit à travailler pour un journal de Verdon, l'Eyes. »
Une foule de personnages, une famille : les Fargo, du patriarche Lincoln aux rejetons pas trop bien réussis et aux suivants encore moins gâtés par la nature tous peu ou prou tarés. On boit, on fornique, on cogne et on fouette les moins forts qui soit, de préférence, même s'ils ne sont pas exclus eux-mêmes de toutes fautes.
A noter que ce livre a été écrit avant ma naissance... ce qui me rajeunit considérablement !
La quatrième de couverture annonce la couleur ; on pense immanquablement aux œuvres d'Eskin Caldwell en particulier au roman "Le petit arpent du Bon Dieu" lu il y a très, très longtemps.
Une écriture très classique, trop à mon goût. On est encore très loin des futurs chefs d’œuvre à venir. On sent dans cette saga familiale une forte influence sudiste, tous les ingrédients sont bien présents, trop présents, trop de personnages d'une même famille, ce qui fait que j'ai eu du mal à finir ce livre.
Un avis des plus mitigés donc... espérons que le prochain de la série me plaira plus !

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7 mars 2016

Le cœur gros !

Après la lecture de « Chevauchée avec le diable », roman que j’avais bien aimé (western se déroulant pendant la Guerre de Sécession), j’attaque un nouveau titre de cet auteur. Le contexte est très différent ; il s’agit d’un roman contemporain se déroulant dans la région du Plateau des Orzark.
Shug, une fois la frontière de l’Etat passé, doit repeindre le camion de Red, qui n’est pas très content de lui, le gros lard comme il l’appelle. Red s’apprête à le corriger mais Glenda fait un rempart de son corps pour éviter que son fils soit frappé, même si elle doit s’offrir pour que les choses rentrent dans l’ordre…
Shug et sa mère habitent près du cimetière où elle travaille. Red passe de temps en temps, Shug n’est pas son fils qui se nomme Morris, le vrai géniteur de l’enfant était surnommé « Le Baron ».
Shug est pour le moins enveloppé et surnommé « Gros lard ». Sa mère par contre l’appelle « Petit cœur » et a un comportement ambigu à son égard pour son âge. Ses tenues et ses gestes sont parfois troublants, ses shorts sont trop courts…
« Petit cœur » est contraint d’accepter de cambrioler des logements vides, de voler tout ce qui a une quelconque valeur, en particulier les drogues et autres médicaments qui se trouvent sous sa main ! Et pour cela il n’est jamais récompensé !
Mais un jour il se fait prendre en flagrant délit par la police… Un homme élégant, Jimmy Vince, avec une superbe voiture, bien sous tous rapports apparaît dans le paysage.
Red revient d’une mystérieuse virée, il offre à Glenda une superbe chemise en pure soie, les poches pleines d’argent. Il les invite au restaurant, mais il s’arrête avant dans un tripot où il perd tout… même le chemisier… qu’il arrache des épaules de Glenda.
Celle-ci téléphone à Jimmy qui s’empresse de venir les chercher.
Et entre lui et Glenda ce qui devait arriver arriva, surtout que Red a disparu bien opportunément !
Glenda et Jimmy décident de partir ensemble laissant Shug à sa grand-mère.
Sauf que….
Shuggie Morris, le narrateur, a une vie familiale pour le moins compliquée, une mère sexy mais dépassée par les évènements. Il est le souffre douleurs de Red, compagnon de sa mère.
Celle-ci, Glenda Atkins, est le genre de femme qui choisit toujours le mauvais amant, qui l’engrosse, la cogne ou qui la plaque.
Son père « Red » est le genre mauvais garçon, sans envergure, éternel perdant devant l’éternel.
Basile Powney, complice de son père, est un des seuls qui, à part sa mère, montre de la gentillesse à son égard.
Jimmy Vince Pearce, belle voiture, parlant et présentant bien, enfin une chance pour Glenda et Shug ?
Le monde des « petits blancs » minables des contrées misérables des États-Unis. On pense bien évidement à des auteurs comme Eskin Cadwell plus au Sud ou John Steinbeck pour la Calfornie.

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2 mars 2016

Alors raconte…

Le dernier roman écrit par l’anglais Robin Cook. Les spécialistes pensent que ce texte est fortement autobiographique. On est très loin de la prose habituelle de Robin Cook.
George Breakwater est un personnage plutôt falot, être en creux, vivant plutôt chichement avec une pension de 500 livres par an. Il est encore jeune, trente-trois ans, solitaire et routinier. Il traverse Londres en métro y passant parfois la journée. Un jour dans un pub, il commet ce que l’on nomme pudiquement un attentat à la pudeur. En plus d’une amende de 50 livres, la justice lui suggère de consulter un psychiatre. Ce sera Madame Sonderzeig, alors il parle de tout ce qui lui passe par la tête, de sa vie, de son enfance et de sa classe sociale, avec laquelle il a un compte à régler. Et la facture est lourde !
Il s’épanche longuement sur son court séjour au célèbre collège d’Eton ! Parmi les écoles de prestige d’Angleterre, ce dernier a la réputation d’être le pire dans le domaine de la sodomie et, certainement de la cruauté envers les plus faibles. Breakwater y a son ennemi intime, un dénommé Greer. La haine et la domination iront plus loin !
Il parle aussi d’une aventure amoureuse des plus étranges, il narre ses rêves de Dieu et de choses plus futiles, ses nuits sont peuplées de rêves récurrents, un homme canard apparait souvent.
Son enfance ne fut pas des plus heureuses, entre ses parents, bourgeois dans l’âme, et lui, c’est une haine profonde. Il a un frère dont il parle peu. Seules deux figures trouvent grâce à ses yeux, Iris sa nurse dont il était amoureux à huit ans, et l’oncle Eddie, personnage hors-normes, truculent et excessif, ruiné après avoir dilapidé sa fortune ; il fut tué à la guerre.
Et la vie continue… et la séance avec Madame Sonderzeig aussi…
La rencontre avec Annie Midships, un voyage en Espagne, du sexe et du vin. La découverte de la misère extrême, puis la rupture sous prétexte que George lisait de trop…
C’est comme une partie de poker menteur entre cette femme Madame Sonderzeig et cet homme aigri et complètement cynique et désabusé.
Toujours une charge violente contre son pays et sa classe sociale avec ces mots très durs, en majuscules dans le texte pour leur donner plus de puissance :
« AH FOUTUE CLASSE SOCIALE, FOUTUE ÉCOLE, FOUTUS SALOPARDS INHUMAINS STUPIDES ET INDIFFÉRENTS, MON ÂME TOUTE ENTIÈRE EST REMPLIE DE HAINE ENVERS MOI-MÊME PARCE QUE JE VOUS AI TOUCHÉ, PARCE QUE JE VOUS AI CONNUS, PARCE QUE J’AI ÉTÉ VOUS, REPRODUISANT À L’IDENTIQUE VOTRE CRUAUTÉ DÉSTESTABLE ET SANS FAILLE …
George Breakwater finira peut-être par trouver une certaine forme de sérénité et par se reconstruire.
George Breakwater, enfant solitaire et élevé sans amour et rejeté dans l’indifférence familiale.
Madame Sonderzeig tente de comprendre cet homme pour le moins surprenant qui lui propose de but en blanc de faire l’amour !
Annie Midships, le grand amour, de son époque « Jouisseur » où le jeu l’avait rendu relativement riche. Ils vécurent ensemble une grande aventure en différents pays d’Europe.
Des femmes qui passent, certaines sont des connaissances de plusieurs années, d’autres sont des fantasmes de l’enfance ou de son adolescence.
Un texte sans concession sur le pays d’origine de Robin Cook.

21,00
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23 février 2016

Il y a de la violence dans l’Eire !

Colin Barrett est un nouveau venu dans les lettres irlandaises. Je le découvre par ce recueil de sept nouvelles. Ce livre a obtenu le « Frank O'Connor Short Story Award » !
La vie dans la campagne irlandaise n’est plus ce qu’elle était !
« Le petit Clancy », deux amis, le narrateur, Jimmy, et Tug, un colosse, homme-enfant sous médicaments, boivent au pub du village. C’est le dimanche soir, Jimmy soigne sa gueule de bois, Tug, lui, obnubilé par l’affaire du petit Clancy, un enfant qui a disparu, sûrement kidnappé. Jimmy pense à Marlène avec qui il a fait l’amour et qui va se marier à un autre, père de son enfant…
« L’appât », un jeune homme et son cousin Matten qui entretient son chagrin d’amour ! Il a eu une aventure avec Sarah mais il ne s’en est pas remis. Couple formé suite à des délibérations entre les garçons et les filles de la bande sous fumette… Matten y a cru ; depuis il traîne sa déprime, il lui reste le billard. Mais il se passe des choses étranges le soir dans les bois !
« Dans sa peau ». Eamonn dit Bat, ce jeune est profondément marqué. Sa vie est devenue un enfer par la stupidité d’un taré, drogué et passablement éméché. Bat était au mauvais endroit au mauvais moment, et depuis il promène son visage ravagé malgré de nombreuses opérations. Un texte très fort sur la bêtise humaine !
« Le calme des chevaux », c’est l’histoire d’une vengeance tragique sur fond de viol, de trafic d’herbe et de problèmes familiaux. Un ancien boxeur, un de ses amis, des oncles paysans irlandais d’une autre époque, vieux garçons vivant dans une ferme délabrée. Mais ils ont laissé l’agriculture traditionnelle pour la culture de l’herbe et ont leurs propres dealers… Pas mal de morts au final !
« Diamants », un homme et une femme qui se rencontrent aux alcooliques anonymes, qui boivent ensemble, tentent de faire l’amour mais ne le peuvent pas. L’homme part quelques jours, boit et reboit encore, puis il rencontre une autre femme. Un texte d’une grande noirceur.
« Merci de m’oublier ». Deux hommes dans un bar doivent aller à l’enterrement d’une femme ; ils furent musiciens dans un orchestre courant après le succès. Ils furent les amants de cette femme, l’un après l’autre et aussi simultanément. L’un des deux l’épousa, le divorce vint vite. Puis le temps a passé inexorablement. Un beau texte plein de tristesse. La vie et ses aléas.
Des personnages pour la plupart tourmentés, des fous furieux comme Tansey le Nabe, des tontons flingueurs trafiquants de drogues, le videur d’une boîte de nuit et la fille de son employeur, des êtres violents, mais aussi des victimes. Mais tous ont des destins affligeants.
Colin Barrett perpétue la longue tradition des auteurs irlandais de nouvelles, des anciens comme James Joyce, Frank O’Connor ou Sean O’Faolain aux modernes comme Anne Devlin, Anne Enright ou Claire Keegan entre autres. La majorité des grands auteurs irlandais ont écrit des nouvelles, John McGahern, William Trevor, Edna O’Brien ou encore Colum McCann et Colm Toibin et je ne peux pas tous les citer.
Pour le reste, j’ai un avis mitigé sur ce recueil, c’est bien écrit, très sombre, noir parfois comme dans « Le calme des chevaux », (près de cent pages), nouvelle qui, pour moi, est la plus aboutie. J’ai trouvé que les textes s’amélioraient au fil des pages mais tous ont un parfum étrange que j’ai du mal à définir, souvent dérangeant. Un bon recueil malgré ces réserves.
À noter une très belle couverture !

Philippe Rey

17,00
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19 février 2016

Marginaux de Pékin.

Auteur que je découvre, comme beaucoup je pense, avec ce premier roman traduit en français.
Un Pékin peu connu, celui des marginaux ou des laissés pour compte de la société chinoise, car il y en a !
DunHang sort de trois mois de prison, un tourbillon de sable et de poussières, le salut ! Il achète des cigarettes et, solitaire, il poursuit ses déambulations, au hasard, sans réellement de but et de point de chute. Ses amis sont tombés en même temps que lui, BaoDing, Gros Bec, Xin’an et SanVan. Il rencontre une jeune femme, Xia, qui vend sous le manteau des DVD pirates. Après avoir beaucoup bu, ils passent la nuit ensemble mais ne consomment qu’au petit matin. DunHang repart au hasard des rues ; il était faussaire et bien évidement il s’est fait prendre ainsi que le reste de la bande. Le soir venu il retourne chez Xia qui lui annonce qu’elle a quitté son fiancé Kuang. Elle souhaite retourner au pays, lui veut rester à Pékin. Ils commencent à travailler ensemble pour la revente des DVD, en ajoutant du porno. Mais Kuang reparaît et Xia hésite…
Alors nous suivons les aventures amoureuses de DunHang ainsi que ses péripéties commerciales et ses démêlées avec la justice et les forces de l’ordre. Il habitera un temps dans un dortoir avec des étudiants qui deviendront ses clients. Kuang deviendra son principal fournisseur. Il aura une cliente très étrange qui ne veut que des DVD de films d’horreur ou très violents ; pour la livrer il achètera un vélo qu'il se fera voler aussitôt ! Alors il se lance dans la course à pied… ce qui lui permettra de fuir la police ! Il fera d’autres rencontres, cherchera une dénommée Qibao, qu’il trouvera et ira voir son complice BaoDing en prison…
Peu de personnages dans ce roman, mais tous sont attachants car ils sont un peu la face cachée du miracle économique chinois. Et surtout loin des clichés traditionnels sur ce pays.
Un peu d’exotisme avec ce roman sur les marginaux de la capitale chinoise. Par exemple :
- Une nouvelle inouïe : trois cent mille tonnes de lœss sont tombées sur Pékin la nuit dernière.
Un bon roman agréable et de lecture facile. Beaucoup d’humour et une quantité de proverbes chinois.
Quelques lignes sont empreintes de poésie et d'érotisme :
- Qibao est un sport de combat, une cascade qui déferle sur lui et tourbillonne il en oublie ce qu'il est censé faire. Plus tard, le torrent rejoint la plaine qui s’évase. DunHang remonte la pente et jouit dans la douce fertilité des basses terres. Quelques secondes d'éblouissement font flotter son corps sur un vaste lit d'eau.